mercredi 28 mars 2012

Cadwallon : ceux qu'on croise dans la rue - 1ère partie

Voilà une serie de personnages que l'on peut croiser dans les rues Cadwëes, vivotant de petits boulots et de maigres rapines.

Des coiffeurs et des barbiers
Silimelle a grandit sous les saules, près de la Verdorée. Enfant songe, il garde de son engeance féerique une crinière intondable, rebelle à tous les traitements, comme une bête bruissante de ses milliers de crins, sans cesse en déplacement sur son crâne. Aussi à le voir pareillement hirsute, le badaud se demande souvent s’il fait bien de confier sa chevelure à un tel personnage. Et pourtant. Silimelle a appris de sa mère les mille et une façons de nouer ou tresser les cheveux, il est vif du ciseau et attentif au goût de son client. Il a, de son enfance curieuse et vagabonde, entre joncs et lagunes, ramené des baumes et des lotions, qu’il expérimentait déjà sur ses camarades avant même peut-être que vous ne naissiez. Il aime sa carriole et la drûne qui la tire, à la force de ses bras cerclés de cuivre et de runes. Elle qui a découvert l’amour et sa propre beauté le jour où Silimelle a taillé dans ses boucles et ses mèches encore toutes coagulées du sang épais des arènes.

Kiryelle joue du rasoir. Elle a appris à en abuser très tôt. Déjà quand les autres pensionnaires de l’orphelinat se moquaient de son visage marqué et de son nez tordu, elle savait zébrer leur chair rose d’un revers prestement asséné, ses doigts fins serrés autour d’une moitié de ciseaux. Puis le temps a passé. La voilà à son compte, avec sa chaise qu’elle promène au quatre coins du fief. Et ses rasoirs. Si vous vous installez entre ses bras, le cou tendu et la tête en arrière, elle vous rendra glabre en quelques mouvements d’une grâce et d’une amplitude contrôlée, avant de remiser son tranchoir d’argent dans une des poches de son gilet de cuir. On raconte que parfois elle arrondirait ses semaines en taillant à même la chair. Pour une guilde ou pour une autre. Quelques balafres de plus sont venues s’ajouter à son visage tailladé, sous les grandes mèches qui lui cachent les yeux. Ce que l’on ne dit pas c’est qu’elle économise, et qu’elle entend bien lancer un jour une meute de ligueurs aux trousses des enfants de salaud qui l’ont mise au monde et défigurée avant de l’abandonner nue et grelottante sur les marches d’un des escaliers du quartier de la Bonne Mine.

Des cireurs de chaussures :
« Barnium le gob, cireur de godasse depuis des générations, mon bon monsieur. On a tellement baigné dans le cirage et les lotions étant gosses qu’on en est tous tachetés mes frères et moi, comme des léopards du syharalna. Enfin il parait… vu qu’on n’y est jamais allés. Vous y êtes allé, vous ? Nan ? C’est des jolies bottes, monsieur, ça… Des vraies de vraies de belles. Permettez ? Ah ça, c’est un mélange, comme qui dirait un secret de famille, vous allez voir un peu le brillant et le satiné après. Y a que mes frères et moi qui utilisons ce produit miracle… Mes sœurs ? Nan, j’en ai pas monsieur… Et puis bon, c’est pas votre affaire. »
De sales bruits courent dans les milieux gobelins des Remparts, sur la famille Barnium et ses nombreux garçons. Des filles, non jamais, pourtant c’est pas faute d’enfanter, les pauvres femmes là-bas sont toujours enceintes d’une portée. Mais jamais de gamines, non. Juste ce drôle de mélange secret…

Ezreph Traum est un vétéran. Un dur de dur. Il a combattu les enfants du Despote, et ceux de l’Hérésiarque, et puis les Dévoreurs et leur hypocrite croisade anti-dieux. Jusqu’au jour où il a marché sur un engin explosif, une bombe de son propre camp. Et là adieu guiboles, adieu caserne. Aucun remerciement pour ses années de service, pas de famille pour l’accueillir, juste la misère et la rue qui l’ont pris dans leurs grands bras sales. Depuis, il fait rouler. Dans sa petite carriole de cul de jatte, il a tout ce qu’il faut pour rendre à vos souliers leur éclat. Exilé au ras du sol, personne ne connaît la texture des venelles mieux que lui, les poussières, les pavés ou la boue. Capable de reconnaître quelqu’un rien qu’à ses chaussures, ou bien de défendre ses maigres économies à grand coup de fer dans les tibias, tel est Ezreph, un cigare à peine allumé en bouche et ses yeux clairs perdus en de vagues réminiscences… Il n’y a qu’avec les autres soldats qu’il sort un peu de sa réserve, et qu’il crache ses souvenirs meurtris, ou son dégoût des chefs et des gradés, tous justes bons à envoyer des pauvres gars comme lui au casse-pipe.

Des charrieurs qui attendent les étrangers et se font passer pour des compatriotes. Plus tard ils entraînent leur proie, les saoule, les assassine parfois, pour mieux les dévaliser.
Puis tandis qu’ils s’endorment, de la drogue versée en douce dans leur chope, il rejoint ses complices avec qui il se partage leurs affaires. Demain il aura un autre visage, et parlera avec un autre accent. Demain, ses victimes ne trouveront au lieu de la chambre où ils ont déposé leurs affaires qu’une pièce vide dans un immeuble en vente.
(Une victime peut reconnaître Gors et faire un scandale en pleine rue, voire pire...)

Et enfin j'ai développé le trafic aérien plus que ne le suggère le livre de base :

Des aveugles à fusée
On les aperçoit parfois au coin d’une rue, ou bien sur une place, dans un endroit dégagé, un abord de parc, ou bien un carrefour. Lunettes fumées sur le bec, et une caisse de pétards sur les genoux, tous aveugles, allez savoir pourquoi, ils vendent pour une pièce l’accès aux cieux. Quand un homme leur achète une fusée, le feu de Bengale qui explose au dessus des têtes et des toits ne fait pas ciller leur pupille, mais les passants qui connaissent s’enfuient ou bien s’abritent dans un recoin de porte cochère. Car, après la fusée, arrive le ballon taxi, un de ces dirigeables à vapeur qui sillonnent le ciel de la cité, plus vite qu’un fiacre mais si souvent soumis aux caprices des vents. Dans un grand bruit de rotor, l’engin se pose à même la place, soulevant détritus et papiers gras, envoyant voler robes et chapeaux dans un tourbillon acre de poussière et de vapeur. Les passagers, courbés en deux, se glissent jusque dans le ventre de la bête, et les voilà partis dans un bouquet de fumée, vers les hauteurs de la ville ou bien des fiefs lointains…

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