mercredi 4 avril 2012

CADWALLON : des évangélistes et des prédicateurs

Théome le Chenu est depuis des années un des rares fervents d’un héros barhan, un de ces paladins de vertu, sanctifiés par l’histoire, un dénommé Issek de la Cruche, qui brisa trente chevalets de torture et finit par arracher de ses mains le sol de sa prison, pour y puiser de l’argile et modeler une cruche que ses bourreaux abreuvèrent de leur larmes une fois le héros enfin disloqué. Les prêches sans élan de Théome ne soulevaient pas la ferveur des foules, jusqu’à une période récente, un soir où il réussit à convertir un Keltois saoul comme une barrique et plus massif que la charrette du pinardier qui les transporte. Depuis à chacun des sermons du vieux prêtres c’est Issek lui-même qui apparaît et réduit en miette l’engin de torture où il est attaché. Qu’importe que le saint barhan cache un ruban de runes keltoises sous une couche de fard, son culte est en train de faire des adeptes de plus en plus influents, dopés par le sens tout particulier de la mise en scène du vieux Théome.
Mais tout ceci n’aura qu’un temps. Vorec le Gris, missionnaire de l’église du Sincère Repentir, a décidé de mettre un terme à la fuite de ses fidèles et de son public vers une église idolâtre. Conscient de l’importance du colosse dans la démonstration religieuse et théâtrale de Théome, il a décidé d’embaucher des assassins pour le faire disparaître. Ce qui complique encore la situation c’est que la ligue du neuf de Safre, appelée aussi ligue des Frères ennemis, qui s’enorgueillit d’avoir en son sein un membre de chaque peuple, est bien décidée à retrouver son sessair. Ce dernier aurait déserté ses frères d’armes à la suite d’une mission dont la violence aurait été dans son esprit comme la goutte d’eau qui fait déborder le vase.


La sœur Gorky est une figure locale. Orquesse convertie à Merin, elle trimbale sa carcasse massive aux quatre coins du quartier, vêtue comme une sœur à cornette, et balançant des sentences tirées tout droit des saintes écritures avec la délicatesse d’un razorback à vapeur. Les gens ont pris l’habitude de lui donner l’obole. Certains se confessent même, dans l’angle d’une porte cochère, moitié pour rire, moitié hypnotisés par ses yeux comme des soucoupes et qui semblent jeter alentours des éclairs furibonds, toujours prêts à foudroyer le pêché et ses sbires.
Au soir, Gorky se retire dans son logement miteux, retire sa soutane et ses faux seins puis s’envoie une triple dose de Kar Noz et écoute sa grosse paluche crisser contre les poils rêches de son crâne rasé. Après c’est tout un calcul. Quelle information vendre, à qui, quelle part du pécule reverser au Temple, pour sa bienveillance amusée, et surtout quelle part pour ces poudres syhares, ce poison merveilleux, ce feu qu’on s’injecte dans les veines, cette bête immonde toujours perchée sur vos épaules et qui vous ronge la cervelle et vous martèle et puis qui finit par vous étrangler.

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